Comportements co-dépendants et travail
L'entourage d'une personne dépendante développe involontairement un mécanisme appelé codépendance. Cela concerne surtout, les amis, la famille ou les proches; mais elle peut également toucher les collègues de travail.
Bien souvent au travail, tout le monde est au courant du problème…mais personne n’ose l’aborder! Le sujet est tabou et les réticences à en parler sont tenaces. La peur de froisser l’autre - collègue parfois de longue date - joue aussi un rôle. Confrontés à un problème de consommation problématique ou de dépendance, les employés et parfois aussi les cadres, ne sachant pas comment aborder la situation, développent des comportements de co-dépendance.
Avec une bonne volonté manifeste et une réelle intention d’aider, les collègues, parfois, vont couvrir ou corriger les erreurs commises, rattraper les retards et surtout cacher la situation, en tous les cas dans les premiers temps, aux supérieurs hiérarchiques. C’est une forme de protection. Si des travailleurs adoptent cette attitude, c’est comme parfois ils le disent: "pour son bien. Il a assez de problèmes comme ça, sans lui en rajouter… ". Evoquer la situation à son chef direct peut être alors perçu comme une dénonciation, une délation avec en filigrane la peur de la sanction rédhibitoire et définitive pour la personne concernée: le licenciement.
Cette surprotection amène l’entourage à s’adapter aux dysfonctionnements de la personne, à s’accommoder des changements constatés et finalement à accepter une situation qui ne serait certainement pas tolérée d’un collaborateur n’ayant pas de problème d'alcool.
Alors que l’entourage veut aider la personne qui boit et lui éviter des problèmes, de par son silence et son mutisme sur les divers dysfonctionnements observés, il permet au problème d'alcool de durer. En effet, si aucune mesure n’est prise, si aucun constat n’est fait et si la situation perdure, le message inconscient communiqué à la personne est qu'elle peut continuer à boire et que l’entreprise va s’adapter à ses dysfonctionnements!
Il se passe souvent des années avant que l’entourage professionnel n’ait atteint la limite de sa tolérance. Il prend alors conscience d’être allé trop loin, d’avoir manqué à son devoir, se sent coupable et coresponsable de la situation. Quand la loi du silence s’est installée depuis longtemps, il est difficile d'en sortir. Personne alors n’ose en parler de peur d’être tenu responsable. Dès lors, l’encadrement direct est "sommé" de prendre les choses en main et de se "débarrasser" du problème.
Les cadres, eux aussi, sont menacés par des comportements de codépendance. Les nouveaux cadres nommés viennent souvent du sérail de l’entreprise et connaissent de longue date certains de leurs collègues.
Pour eux, il est parfois difficile d’aborder une situation problématique concernant l’alcool. Ne sachant pas comme le faire, et liés par des liens émotionnels, ils préfèrent souvent le silence, de peur de ne pas être acceptés ou d’être rejetés par leurs anciens collègues.
Pour certains "vieux" cadres de proximité aussi, les comportements codépendants peuvent exister. Au travers d’un management à l’ancienne, de type paternaliste, fonctionnant encore dans certains milieux, le chef va s’engager personnellement dans le processus et va taire la situation à sa hiérarchie.